Le design émerveille, interroge et fascine à travers les époques. Un simple mot qui englobe une infinité d’éléments et de questions, tout comme l’écologie. Que se passe-t-il alors quand deux entités signifiant tout et leur contraire se rencontrent ? Une (r)évolution.
Arthur Dias

Collection fabriquée en France de la maison d’édition d’objets éthiques toulousaine Reine Mère.
Ils sont présents partout, possédant le don d’ubiquité, le design et l’écologie n’ont pu échapper à personne. Sur le bout des lèvres d’un artiste ou dans les pensées d’une nouvelle génération soucieuse de son avenir, ces deux amas de lettres sont parfois utilisés à tort et à travers. Dans une société qui nous conforte dans l’idée d’agir avant de réfléchir, la bonne compréhension d’un sujet avant d’en débattre est plus que jamais primordiale. Il est donc essentiel de revenir aux bases des différents termes pour mieux les assimiler.
Les origines
Le mot DESIGN est sans surprise un anglicisme, emprunté vers 1959 à nos voisins britanniques. Néanmoins, il est plus étonnant de noter que ce dernier est lui-même originaire de l’Hexagone. En effet, il est né du mot français dessein, qui signifiait à la fois « dessin » et « but » jusqu’au XVIIe siècle. La conception même du design a vu le jour quelques décennies plus tôt, en 1925. Les pionniers sont des figures mondialement reconnues : le Bauhaus en Allemagne, Frank Lloyd Wright aux États-Unis et Le Corbusier chez nous. Ils ont inspiré un grand nombre de peintres, de sculpteurs ou encore d’architectes. La signification de ce mot que l’on peut lire et entendre dans l’entière-té des domaines touchant de près ou de loin au monde de l’art reste pourtant flou. Chacun s’est approprié ce terme et l’a façonné peu à peu pour le rendre en adéquation avec sa vision, tel une œuvre d’art. Voici ce qui s’approche le plus précisément de la véritable définition de ce mot tant apprécié : le design est une discipline visant à une harmonisation de l’environnement humain, depuis la conception des objets usuels jusqu’à l’urbanisme.« Discipline », « environnement », « humain » ou encore « urbanisme »... Les similitudes sont nombreuses avec l’ÉCOLOGIE. Ce terme inventé en 1866 par le biologiste allemand Ernst Haeckel est sans aucun doute un des plus employés à l’heure où vous lisez ces lignes. Généralement suivi de nouvelles négatives, il reste cependant synonyme d’espoir et d’innovation.
Le cycle de vie
Décortiqués, les termes de design et d’écologie ont dé-voilé leurs secrets. Il est alors temps de les assembler pour donner vie à l’écodesign. Cette notion apparue au XXIe siècle possède une jumelle : l’ÉCO-CONCEPTION. Cette dernière concerne la partie développement et fabrication d’un produit, lorsque l’écodesign se concentre sur les domaines esthétiques et fonctionnels. En réalité, l’un ne vit pas sans l’autre, les concepteurs et designers étant obligatoirement contraints de passer par ces étapes pour arriver à un résultat qualitatif et écoresponsable. Ces différentes phases de création ne vont pas se li-miter à donner vie à un produit mais également à l’accompagner jusqu’à la fin de son existence. « L’analyse du cycle de vie est primordiale pour déterminer le futur d’un produit. On s’assure qu’il soit recyclable en faisant en sorte que tous les éléments puissent se détacher et que chaque matière puisse être ex-traite. Pour cela, on limite la colle et les vis », explique Bruce Ribay, fondateur de Noma, éditeur français de mobilier et d’objets de haute qualité à partir de matières recyclées et biosourcées.
Il existe divers moyens d’assurer un cycle de vie pratiquement infini. Le plus commun est de restaurer ou transmettre une pièce d’exception de génération en génération à l’image du fauteuil LC2 Poltrona imaginé par Le Corbusier. Ses matériaux et son modèle intemporel lui assurent une longue durée de vie et de se fondre dans tous les styles de décoration, ancien comme moderne. Néanmoins, le moyen le plus élémentaire se situe sans surprise dans la nature. « Nous possédons des sources de matières durables comme les forêts en France. On supporte de fortes demandes de pays comme la Chine concernant nos chênes grâce à une parfaite gestion de nos bois. Pour chaque arbre coupé, on en plante deux », détaille le Toulousain Stéphane Clivier, gérant de Reine Mère, maison d’édition d’objets éthiques fabriqués en France.Un système qui inspire, à l’image du select store de création artisanale FOR ME LAB qui s’engage à planter un arbre pour chaque table achetée. Un argument de vente indéniable qui encourage les clients possédant une sensibilité écologique à se tourner vers ce type d’enseignes. Pourtant, au fil des années, des entreprises peu scrupuleuses ont réservé de mauvaises surprises aux acheteurs, en adoptant le tant redouté... greenwashing.

Collection Ibiza de Vondom en plastique recyclé provenant de la mer Méditerranée.
Inaccessible ?
Si le grand public ne se rue toujours pas sur le mobilier éco-responsable, la raison est claire : le prix. Paramètre crucial lors de l’achat, l’éco-design pâtit d’une étiquette pratiquement indécollable due à ses prédécesseurs comme l’alimentaire et l’automobile. En effet, ces domaines ont été les précurseurs de la vague écologique sur le marché financier, avec des entrées fracassantes dues aux prix largement au-dessus du marché. Depuis, l’ajout « éco » est synonyme d’inaccessible pour de nombreux Français... À tort. La vérité d’hier n’est pas celle d’aujourd’hui. Si le Made in France et les matériaux naturels gardent une cote élevée sur le marché, des alternatives abordables ont émergé ces dernières années. Grâce au phénomène de la seconde main dans le monde de la mode, des sites internet ont ajouté la case mobilier à leur catalogue. À l’image de La Reboucle, site de seconde main entre particuliers et branche de la célèbre enseigne La Re-doute. Il existe également des options moins connues du grand public comme Recyclo’Bat. Spécialisée dans le réemploi de matériaux par la collecte et la revente, l’association a connu une forte croissance assure son gérant Édouard Baudoin : « On a bien plus de clients qu’auparavant. Ils viennent pour les prix avantageux et également pour changer leur façon de consommer. Il y a une volonté d’acheter malin ». Si le mot « éco » définit parfaitement cette attitude de consommer responsable, hors de question de faire une croix sur le critère « design ». Des perles rares se cachent parmi les tuiles et les planches : « On récupère de tout, même des douches à l’italienne que l’on vend à moitié prix du marché ». Meubles écologiques sortis de l’esprit des plus grands designers, seconde main entre particuliers ou recyclerie, les possibilités d’acquérir du mobilier éco-responsable s’agrandissent chaque jour, pour tous les goûts et tous les prix.
Retrouvez la suite de l'article dans MA MAISON édition Toulouse numéro 28 !