Jusqu’au 27 décembre, le Grand Presbytère de Martres-Tolosane accueille l’exposition Double Jeu qui réunit le peintre Bernard Cadène et le sculpteur Philippe Gauberti. À cette occasion, nous les avons rencontrés dans les jardins du centre d’art contemporain.
Le peintre Bernard Cadène et le sculpteur Philippe Gauberti devant leur œuvre commune spécialement créée pour l’exposition Envol-Émoi.
Encore une fois, la grande exposition temporaire au Grand Presbytère de Martres-Tolosane vaut le détour. À 50 km au sud-ouest de Toulouse en direction de Tarbes, la commune millénaire est un haut lieu de l’artisanat d’art. Aux portes du Comminges elle est célèbre pour ses faïenceries, son salon des Arts et du Feu fin octobre et son centre d’art contemporain le Grand Presbytère. C’est là que se tient la formidable exposition Double Jeu jusqu’au 27 décembre. Elle réunit deux artistes du sud-ouest de la France que pourtant tout semble opposer : le peintre coloriste Bernard Cadène et le sculpteur de métal Philippe Gauberti. Ce double « jeu » acoquine le « jeu » des mille et une couleurs du premier avec la dualité du « jeu » du second. Bernard Cadène compte 61 ans de carrière artistique et 138 expositions personnelles. On trouve ses toiles chez les collectionneurs du monde entier. De très nombreuses galeries exposent ses œuvres en permanence. Sa peinture est à l’image de l’homme : libre, fantasque, optimiste, souvent fougueuse et débordante, parfois explosive et violente.
Odalibre silver, sculpture de Philippe Gauberti.
« La force de la peinture de Bernard est immédiate, explique Philippe Gauberti. J’ai découvert son travail chez un client. J’installais une de mes pièces sous un Cadène. Je l’ai pris en pleine face : le mouvement, la couleur, l’immédiateté. Nous avons tous les deux des démarches très complémentaires. On aime donner une évidence. Dans les œuvres de Bernard, c’est l’évidence de la ligne et son opposition. » Philippe Gauberti sculpte le métal depuis 20 ans. « J’ai d’abord passé dix ans à chercher mon univers. J’ai testé le bois, la résine, le métal… J’ai tout jeté pendant dix ans. Puis j’ai rencontré le maitre ferronnier Gilles Benhamou qui m’a expliqué le métal. Je me suis reconnu dans sa dualité : rigide et froid, il devient chaud et liquide. Depuis dix ans je ne travaille plus que le métal, l’inox, avec beaucoup d’huile de coude. Je ne travaille pas le métal à chaud, je le travaille à froid pour conserver la trace de la contrainte que lui imposent les serre-joints et les vérins. Cette technique me permet d’atteindre un aspect liquide du métal. » « Je suis entré petit à petit dans le travail de Philippe, reconnaît Bernard Cadène. J’ai cherché à comprendre puis il m’a donné ses explications. J’ai analysé les formes, sa sculpture, la lumière, la brillance, les couleurs, les reflets. Sa sculpture est en perpétuel changement, elle bouge en permanence. »
L’Odalibre de Philippe Gauberti fait double jeu avec la toile Fleurs au bord de l’eau de Bernard Cadène.
« Bernard Cadène fait de l’abstrait concret et moi du concret que je rends abstrait. » Philippe Gauberti
L’effleure du mal orange de Philippe Gauberti devant la toile Cathédrale Saint-Sernin de Bernard Cadène.
« Si à travers mes œuvres, je souhaite questionner la complexité de l’être humain, je ne me définis pas dans cet art conceptuel qui ne considère que l’idée de l’œuvre et non sa réalisation, explique Philippe Gauberti. Je m’attache tout autant à l’esthétisme de mes œuvres et je cherche à relier les deux : le concept et le beau. » « Ma peinture évolue sans cesse, reconnaît Bernard Cadène. Je vais de plus en plus vers de choses abstraites. Je garde bien sûr mon étiquette de coloriste. Avec trois traits je pose le sujet mais si on les supprime la peinture devient abstraite. » « Bernard fait de l’abstrait concret et moi je fais du concret que je rends abstrait, résume Philippe Gauberti.
Est-ce un miroir ? Est-ce Bernard Cadène ? Le peintre tente de percer les secrets de Philippe Gauberti devant l’œuvre du sculpteur Illuptik jaune et noire.
Dans les peintures de Bernard, le chaos est dans la toile, c’est bouillonnant dans le cadre. Tandis que mes œuvres sortent du cadre. Quand Bernard joue avec une exagération chromatique, je suis plutôt bichromique. Mes sculptures sont d’abord rangées, ancrées puis elles sont déformées. En sculpture, l’artiste pense en 3D. Quand je la fais, qu’elle est réussie, une partie de l’œuvre m’a échappé. Pierre Soulages a déclaré : « Quand j’ai fini une œuvre, je me rends compte de ce que j’ai cherché ». « Pour moi ça passe ou ça casse, plaisante Bernard Cadène. Je compose à partir de croquis que j’assemble. Puis je peins très vite. Je travaille l’acrylique et l’huile, gras sur maigre. Je peins le matin, l’après-midi. Je réussis à marier des couleurs improbables. Ce n’est pas ce qu’on m’avait appris aux Beaux-Arts. Aucune couleur ne sort du tube, ce ne sont que des mélanges. Jusque dans mes noirs, je rajoute de la couleur. Puis je pose le tableau au fond de l’atelier. J’ajoute une touche de peinture, parfois entre deux couleurs il suffit d’un trait pour créer une vibration. Quand ça ne me plait pas, je repeins par-dessus ou je détruis. J’ai beaucoup de mes tableaux à la décharge de Cugnaux. » « Un jour, se souvient Philippe Gauberti, j’ai été très impressionné de voir deux coups de cutter lacérer un tableau de Bernard. On cherche tout le temps, on jette beaucoup. » Vous l’aurez compris, l’exposition Double Jeu recueille les confessions artistiques de deux figures de l’art contemporain. Elle met en scène la confrontation peinture-sculpture dans leur rapport à l’espace, au temps et à la sensorialité. Elle est aussi le lieu de deux œuvres communes devant lesquelles on a la certitude que de ce double jeu les deux artistes sortent vainqueurs.
Dialogue entre Illuptik orange et noire de Philippe Gauberti et Orage et vent de Bernard Cadène.
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